S’il y a bien une personne qui est toujours ponctuelle dans l’arrondissement de Péronne, c’est le sous-préfet, Joël Dubreuil. Mais s’il est toujours ponctuel à la minute près, il peut arriver que le représentant de l’État soit soumis au timing serré d’un emploi du temps surchargé. C’était le cas mardi 11 novembre, jour de commémoration de l’Armistice. Le représentant de l’État présidait l’inauguration du monument aux morts rénové d’Herbécourt (entre Bray-sur-Somme et Péronne).
Il avait cependant tenu à assister également à la commémoration à Péronne, capitale de son arrondissement, et il s’était organisé pour y parvenir. Selon nos informations, à Herbécourt, il aurait demandé que la manifestation soit légèrement avancée, afin de lui permettre d’arriver à Péronne à 10 heures, horaire du début de la cérémonie.
Sur le chemin du retour, alors que son chauffeur le conduisait vers la place de la mairie à Péronne, située à 10 kilomètres de là, il aurait appelé un élu de la majorité afin de lui signaler son léger retard et lui demander que la commémoration démarre avec quelques minutes de décalage. Ce qui n’a pas été le cas.
« Il est remonté dans sa voiture et il est parti »
Le départ en cortège vers le monument aux morts, prévu au protocole à 10 h 10, s’est fait avec 6 minutes d’avance, à 10 h 04. Le temps de parcourir les 400 mètres menant au monument aux morts ; le temps pour les autorités, les associations patriotiques, l’harmonie municipale, les pompiers, les enfants et le nombreux public de s’installer, la cérémonie a pu démarrer à 10 h 17, avec la montée des couleurs.
Un premier moment de recueillement durant lequel la voiture du sous-préfet est arrivée. « Il est descendu de voiture et a attendu au moins 5 à 10 minutes », assure une spectatrice qui a remarqué la scène. « Il a échangé quelques mots avec un policier municipal, mais personne n’est venu le chercher. Il est remonté en voiture et il est parti. Il semblait très en colère », ajoute un autre spectateur.
Le sous-préfet était notamment chargé de lire le message gouvernemental. Ce qui n’a donc pas été fait. La gerbe qu’il devait déposer au nom de l’État a, quant à elle, été déposée en son absence, sur demande du maire, mais sans que son nom soit mentionné.
À 10 h 40, le cortège était de retour sur la place Daudré. Les pompiers, les écoliers (qui avaient chanté plus tôt La Marseillaise), l’harmonie et les porte-drapeaux ont été salués par les autorités qui ont invité l’assistance dans la salle Altena de la mairie, afin d’y écouter le discours du maire et prendre le verre de l’amitié.
Thérèse Dheygers a commencé par excuser le sous-préfet et Valérie Kumm, vice-présidente du conseil régional et ancien maire, expliquant de manière hésitante qu’ils étaient retenus à une autre commémoration. Pourtant, Valérie Kumm était dans la salle, tandis que le sous-préfet fulminait, assis à l’arrière de sa voiture, garée juste devant la mairie. Et en plein milieu du discours, le représentant de la Délégation militaire départementale (DMD) s’est fait discrètement convoquer.
Le sous-préfet au monument aux morts dans l’intimité
Ce qui s’est dit entre les deux hommes restera entre eux, mais visiblement, le sous-préfet était très en colère. Ses grands gestes et son index pointé trahissaient un certain agacement. Et si le représentant de la DMD se faisait « remonter les bretelles », selon un élu qui a remarqué la scène, c’est que dans pareilles circonstances, en l’absence imprévue du représentant de l’État, lui revenait la mission de lire le message gouvernemental et d’aller déposer la gerbe.
Les deux hommes, accompagnés du commandant de la compagnie de gendarmerie, se sont ensuite rendus au monument aux morts pour permettre au sous-préfet d’accomplir son devoir dans l’intimité. Il a ensuite quitté les lieux pour aller présider une autre cérémonie, tandis que le commandant des gendarmes ramenait en voiture le représentant de la DMD qui a aussitôt, et discrètement, quitté les lieux.
Dans la salle Altena, bien peu de personnes ont remarqué l’incident. Certains élus n’étaient même pas au courant. Thérèse Dheygers en avait, elle, bien conscience. Elle n’a pas souhaité faire de commentaire. Tout comme le sous-préfet, qui n’a pas répondu à notre sollicitation téléphonique.